Il y a tout juste un an nous publions un plaidoyer pour le paralpinisme dans le massif du Mont-Blanc. Celui-ci mettait en avant une pratique responsable du BASE Jump en haute montagne, dans la lignée du style alpin valorisé par les alpinistes.
Cette approche différente des propositions précédentes a retenu l’attention de la municipalité de Chamonix. En accord avec l’esprit que véhicule l’association de saut de falaise de l’Arve et du Giffre, les élus responsables en charge de ce dossier nous ont accompagnés pour trouver des réponses adaptées au contexte Chamoniard.
Fin 2020 notre association était en mesure de proposer des solutions concrètes qui furent retenues par la municipalité et qui sont retranscrite aujourd’hui dans le nouvel arrêté publié ce vendredi 17 septembre 2021 et qui abroge l’ancien arrêté d’interdiction de pratique sur la commune de Chamonix.
Grâce à la confiance que vous nous avez accordé en manifestant votre accord au plaidoyer du paralpinisme dans le massif du Mont-Blanc, et grâce au travail du conseil d’administration, nous sommes heureux de mettre en lien ci dessous l’arrêté municipal qui réglemente la pratique du paralpinisme sur la commune de Chamonix.
Depuis le 5 octobre 2016 l’autorisation de la pratique de la wingsuit est suspendue sur le territoire de la commune de Chamonix Mont-Blanc et ce jusqu’à nouvel ordre. De fait, c’est toute une partie du paralpinisme qui est rendu impossible dans le massif du Mt-Blanc. (Lire l’arrêté : https://www.chamoniarde.com/images/files/Arrete-wingsuit-2016.pdf )
Chamonix possède sur sa commune 2 sauts majeurs et particulièrement accessibles qui ont déplacé les wingsuiters du monde entier entre 2014 et 2016. Cette sur-fréquentation d’un nouveau type venant se rajouter à des activités aériennes déjà implantées dans un espace réduit par une urbanisation croissante a rapidement trouvé ses limites. Après de nombreuses plaintes de propriétaires voyant les BASE-jumpers se poser sur leurs terrains et un malheureux accident où un wingsuiter a trouvé la mort en zone urbaine Chamoniarde, la municipalité s’est vue obligée de bloquer cette nouvelle pratique.
Mais l’arrêté qui s’est imposé pour éviter le sur-accident a interdit la pratique depuis des montagnes comme les Grandes Jorasses, la Dent du Géant, les Drus etc… La commune de Chamonix ne se réduit ni à sa vallée ni aux seuls sommets du Brévent et de l’Aiguille du midi. Elle offre ce terrain de jeu extraordinaire qui en a fait la capitale mondiale de l’alpinisme et un pôle touristique de premier ordre. Dans cette foule de visiteurs, le touriste en quête de dépaysement côtoie l’alpiniste chevronné. Tous deux empruntent la même remontée mécanique mais leurs connaissances de la montagne est complètement différente.
Grand Capucin
De la même manière il faut distinguer le paralpiniste du BASE-jumper. Quand le BASE-jump est un moyen, le paralpinisme est une fin. Le paralpinisme est une éthique comme le « style alpin » l’est à l’alpinisme. Le paralpinisme est une combinaison qui commence par une ascension et qui se termine par un saut. Cette éthique contraint par essence. Elle nécessite une solide connaissance de la montagne, des conditions, de la météo, de l’aérologie, de la capacité à tenir un horaire, du choix de matériel, de l’itinéraire. Cette discipline oblige à préparer en amont et à réfléchir à tous les paramètres pour rendre l’objectif réalisable. Elle oblige aussi à se remettre en cause et à interroger sa capacité à réaliser le tout. Par nature le paralpinisme rend difficile le consumérisme. Le saut, même s’il reste l’objectif, ne devient qu’une partie de l’ensemble. Dès lors il est aisé de comprendre qu’il y a une différence radicale entre les sauts accessibles par remontées mécaniques et les autres. Une grande différence entre le fait de se retrouver au bord de la passerelle de l’aiguille du midi en basket un café à la main et le fait de devoir mettre ses crampons, s’encorder, descendre l’arête enneigée pour continuer vers le rognon du Plan ou la pointe Durier pour enfin sauter avec tout l’équipement d’alpinisme sur soi.
En conclusion c’est à travers cet esprit de l’alpinisme que l’association souhaite voir la ré- ouverture des sauts de paralpinisme en wingsuit sur la commune de Chamonix sans demander la ré-ouverture du saut de l’Aiguille du Midi ou du Brévent. De plus, comme ils resteront rares et préparés, les sauts surplombant la ville de Chamonix ne doivent pas être interdits. Par contre il sera demandé aux paralpinistes d’ouvrir leurs parachutes avant les habitations et de survoler Chamonix uniquement sous une voile ouverte. Dès lors ils seront considérés comme des parapentistes.
Notre sport, extension de l’alpinisme (Alpinisme inscrit au Patrimoine Culturel Immatériel de l’UNESCO), est une pratique propre qui ne laisse aucune trace et semble de fait aussi légitime que le ski ou le parapente. Pour terminer, voilà ce qu’écrivait Erich Beaud en 2003 en préface du topo de paralpinisme :
« Le paralpinisme est un véritable sport de montagne. Le plus important à mes yeux est le respect du milieu, respect du terrain en ne laissant aucune trace de notre passage, respect absolu de la faune et de la flore, respect du silence et bien évidemment respect des habitants, des cultures, des propriétés privées. L’attitude irréprochable que nous avons eu jusqu’à ce jour et l’absence totale d’impact de notre sport sur le milieu facilitera grandement notre reconnaissance et notre acceptation par les habitants et les autorités des zones où notre merveilleuse activité est menacée. »